La loi de sécurisation de l’emploi du 14 juin 2013 a mis en place un dispositif légal de maintien temporaire, à titre gratuit, des garanties collectives de prévoyance complémentaire pendant les périodes de chômage.
En effet, il permet à chaque salarié, en cas de rupture du contrat de travail ouvrant droit à la prise en charge par l’assurance chômage et sauf faute lourde, de continuer à bénéficier pendant sa période de chômage et dans la limite de 12 mois, des garanties collectives contre le risque décès, les risques portant atteinte à l’intégrité physique de la personne ou liés à la maternité et les risques d’incapacité de travail ou d’invalidité.
En se fondant sur la règle prévue à l’article L. 911-8 du Code de la sécurité sociale, la Cour de cassation affirme que la portabilité des droits doit être appliquée même en cas de placement en liquidation judiciaire de l’entreprise. Ainsi, les garanties « frais de santé » et « prévoyance » prévues par le contrat collectif d’assurance souscrit par l’employeur, doivent être maintenues au profit des anciens salariés.
Après avoir précisé que les dispositions de l’article L. 911-8 du Code de la sécurité sociale revêtent un caractère d’ordre public, la Haute juridiction indique que celles-ci n’opèrent aucune distinction entre les salariés d’entreprises in bonis (c’est-à-dire celles qui ne sont pas en difficultés) et les salariés dont l’entreprise se trouve placée en liquidation judiciaire.
Pour ces raisons, la Cour de cassation estime qu’il n’y a donc pas lieu d’exclure les salariés licenciés à la suite de la liquidation judiciaire de leur ancien employeur, de la possibilité de bénéficier de la portabilité des garanties collectives.
Pour mémoire, la Cour de cassation avait déjà indiqué, dans plusieurs avis du 6 novembre 2017, que le dispositif de portabilité de l’article L.911-8 du Code de la sécurité sociale s’applique également aux anciens salariés licenciés d’un employeur placé en liquidation judiciaire qui remplissent les conditions fixées par ce texte. Toutefois, elle indiquait que le maintien des droits implique que le contrat ou l’adhésion liant l’employeur à l’organisme assureur ne soit pas résilié.
Pour rejeter l’argument avancé par l’assureur, la Cour de cassation ajoute que la loi n’érige pas l’existence d’un dispositif assurant le financement du maintien des couvertures santé et prévoyance en critère ou condition d’application pour le bénéfice de la portabilité.
La portabilité des droits des anciens salariés licenciés à la suite d’une liquidation judiciaire de leur entreprise, doit donc être appliquée par l’assureur même lorsqu’aucun dispositif de financement visant à maintenir les garanties complémentaires n’existe.
Concrètement, avec cet arrêt du 5 novembre 2020, la Cour de cassation procède à un revirement de sa jurisprudence. En effet, elle abandonne la position qu’elle avait tenue dans un arrêt rendu le 18 janvier 2018. À l’époque, la Haute juridiction avait considéré que « l’absence d’un dispositif assurant le financement du maintien des couvertures santé et prévoyance lorsqu’une entreprise est en situation de liquidation judiciaire, […] était de nature à constituer un obstacle au maintien de ces garanties au profit d’un salarié licencié ».